Christophe Paul, plongeur sous-marin chevronné, nous raconte une histoire singulière : celle d’un poisson qui a adoré les bulles des plongeurs.

Vous plongez depuis de nombreuses années, et vous avez connu il y a 10 ans une expérience particulière avec un poisson, que vous aviez envie de partager…

Christophe Paul : Absolument. Avant tout, il faut savoir que les poissons sont, en général, plutôt craintifs : ils ont peur des plongeurs. Nous sommes des étrangers dans leur environnement, avec notre matériel, nos bulles…

Vous sous-entendez par là qu’ils ne s’approchent pas des plongeurs ?

Exactement. Ils ont plutôt tendance à les fuir, et à fuir leurs bulles. Chaque plongeur connaît la frustration d’un mouvement trop rapide, qui entraîne la disparition à toute allure du poisson cherché de longues minutes. Mais malgré tout, j’ai le souvenir d’une expérience assez amusante il y a dix ans environ, en Égypte.

La Mer Rouge est une destination plongée incontournable !

En Égypte ? Vous plongiez donc en Mer Rouge ?

La Mer Rouge fait partie de ces destinations plongée incontournables. La faune et la flore sont si diverses ! De nombreux plongeurs en tombent amoureux et reviennent plusieurs fois. Il y a de nombreux spots où se régaler ! C’est une destination qui peut se faire quel que soit votre niveau de plongée et vos envies. Elle est magique ! Aussi bien pour les amateurs de requins que pour les plongeurs confirmés, les passionnés d’épaves ou les débutants.

Mais je digresse… C’était donc un séjour de plongée d’une semaine, en Mer Rouge, avec deux à trois plongées par jour. Durant ces sept jours, j’ai observé un “poisson-trompette” avoir un comportement que je n’avais jamais vu auparavant.

Un poisson-trompette ? A quoi cela ressemble-t-il ?

C’est un poisson à la fois long et mince. Il a une forme très allongée, filiforme pourrait-on dire. Ses nageoires qui sont quasiment au niveau de sa queue, et il se déplace souvent à la verticale. On l’a appelé “poisson-trompette” à cause de sa bouche, un peu évasée, qui fait penser aux instruments à vent.

On le voit la plupart du temps immobile, la tête en bas, guettant ses proies. Il se nourrit principalement de crevettes et de petits poissons.

On ne le trouve qu’en Mer Rouge ?

Non, il en existe dans différents endroits du globe. On le trouve généralement entre 3 et 20 mètres, dans des herbiers ou à proximité des récifs coralliens. Il peut être de plusieurs couleurs. Celui-là était jaune. Je m’en souviens très bien, comme si c’était hier.

Décidément, ce poisson semble vous avoir marqué. Qu’a-t-il bien pu faire pour retenir ainsi votre attention ?

Eh bien, il s’est servi de nos bulles pour se camoufler et lancer des assauts. « Ce poisson a utilisés les bulles des plongeurs pour fondre sur ses proies »

Il vous a attaqué ?

Non, non, pas du tout (Rires). Pas nous. Il s’est servi des bulles que nos expirations produisaient dans l’eau, et qui remontaient à la surface, pour passer inaperçu.

Vous voulez dire qu’il s’est approché de vous afin d’utiliser vos bulles ?

Tout à fait. Il se cachait derrière nos bulles, et remontait avec elles. Au début, nous avons été amusés par ce poisson un peu “fou fou” qui venait jouer avec nous. Et puis nous nous sommes rendu compte qu’il ne jouait pas du tout. Il chassait. En fait, il y avait un banc de petits poissons au-dessus de nous, et il se servait de la cachette inespérée que lui procuraient nos bulles pour attaquer le banc de poisson en fonçant dedans. C’était une technique de chasse, ni plus ni moins. C’était vraiment insolite !

Vous avez revu ce poisson ?

Oui, c’est ça qui est incroyable. Il est venu jouer avec nos bulles à chaque plongée. Je crois qu’il avait compris que c’était la meilleure cachette qui soit. J’ai entendu depuis, des histoires de poissons qui s’approchent des plongeurs… Mais un comportement pareil, de chasseur... Jamais ! J’aimerais beaucoup revivre cette expérience un jour, mais j’en doute...